Se lancer en affaires est une décision importante qu’il ne faut pas prendre à la légère. Pour ce faire, il faut bien analyser les différentes formes d’entreprise qu’un futur entrepreneur souhaite exploiter afin de répondre le mieux à son désir d’entrepreneuriat. Une des formes privilégiées par les entrepreneurs est la franchise, car elle permet de bâtir un réseau en exploitant une bannière déjà existante (la plupart du temps). L’objectif étant de mettre en place un réseau de distribution de produits et services à tous les membres du réseau. Par contre, nombreux sont les cas où les relations de franchiseurs-franchisés se retrouvent dans l’actualité en raison d’un problème important dans l’exécution de leur entente contractuelle. D’ailleurs, c’est le cas de la poursuite impliquant les franchisés des Cafés Second Cup contre leur franchiseur[1]. Ils se plaignent du contrôle du franchiseur qui est trop important et qui les poussent à s’endetter pour satisfaire leurs critères qui ne peuvent l’être : « Les plaignants affirment que les « franchisés déjà pris à la gorge et nageant dans les dettes devaient soudainement s’endetter encore. Ils se plaignent de préjudices causés par les franchiseurs qui ne leur ont pas laissé d’autre choix que de s’endetter » [2]. Afin de mieux comprendre certains sujets d’actualité, nous allons découvrir en quoi consiste la franchise.
La franchise est une relation contractuelle entre deux personnes d’affaires, dans laquelle le franchiseur donne au franchisé le droit d’utiliser le nom, la marque de commerce, son savoir-faire, ses méthodes « dans le but de faire des affaires en distribuant des produits ou en fournissant des services »[3] . Le franchiseur concède donc la franchise au franchisé, mais le franchiseur garde un certain contrôle sur le franchisé. Le franchisé doit payer une somme initiale pour utiliser la franchise et doit payer une redevance au franchiseur à partir des revenus produits du franchisé. Le contrat de franchise implique une autonomie juridique des franchisés et une subordination économique aux franchiseurs. Il faut absolument la transmission d’un savoir-faire pour qu’une franchise puisse exister. « Cette collaboration a pour but un développement accéléré des entreprises contractantes, par l’action commune résultant de la conjonction des hommes et des capitaux, tout en maintenant leur indépendance respective, dans le cadre d’accords d’exclusivité réciproque.»[4]
Obligations du franchiseur
Le franchiseur n’a pas une obligation de résultat envers le franchisé, mais doit néanmoins prendre les mesures nécessaires afin de protéger le franchisé contre les changements de marché. C’est donc une obligation de moyen qui découle d’une obligation de bonne foi. Ainsi, il y a une obligation implicite de soutenir la marque. Les franchiseurs se doivent « de protéger, d’améliorer et de rehausser la marque [et la] présomption sous-jacente à toute convention de franchise voulant que la marque favorisera la poursuite d’activités commerciales viables »[5] . Les obligations implicites se déduisent du fait que cette relation d’affaires se veut de longue durée, et la Cour d’appel[6] affirme que cette collaboration est basée sur le long terme[7]. Les franchisés doivent pouvoir bénéficier de l’expérience du franchiseur qui a su réussir commercialement en raison de son savoir-faire. Le franchiseur doit fournir une assistance technique[8] et commerciale aux franchisés avant et tout au long de la relation de franchise. Le franchiseur a aussi une obligation d’information envers son (ses) franchisés[9].
Obligations du franchisé
Le franchisé doit s’assurer de respecter le contrôle du franchiseur en ce qui concerne la mise en application de la franchise afin d’assurer l’intégrité du réseau. Les obligations du franchisé sont nombreuses envers le franchiseur, ce qui peut incomber d’énormes dépenses pour satisfaire aux exigences du franchiseur. Le franchisé doit acquitter des redevances sur le revenu ou sur ce qui est prévu au contrat[10]. Il doit également respecter les règles établies par le franchiseur au niveau des heures d’ouverture, des rapports à fournir, des ventes à enregistrer, des relations avec la clientèle, de l’utilisation de la marque de commerce et des bannières, des promotions, du respect du secret de commerce, du respect des lois en matière de travail, des fournisseurs…[11] Comme il est possible de le constater, c’est un entrepreneuriat qui est très contrôlé et encadré, laissant ainsi peu de liberté entrepreneuriale aux franchisés qui doivent de conformer à toutes ces obligations. Bref, le franchisé est tenu de se renseigner, de contribuer au système de franchise mis en place par le franchiseur et doit être loyal[12] envers le franchiseur[13].
Il y a tout de même des éléments défavorables en ce qui concerne les PME et le franchisage : « facilité, entreprenariat encadré, tributaire de réseau, investissements importants, partage de profits, difficulté en cas de vente de l’entreprise, pénalités bris de contrat, frein d’expansion d’affaires, risque de perte de l’établissement à la fin du contrat »[14] . C’est pourquoi il faut s’assurer que ce choix de commerce conviendra le mieux à la façon dont une personne veut monter son entreprise.
En somme, pour que cette relation fonctionne à long terme, il faut :que les deux parties au contrat, soit le franchiseur et le franchisé, fassent du profit selon des objectifs communs. L’uniformité des techniques commerciales est la clé de la réussite du réseau de franchise. Ils doivent par conséquent collaborer de bonne foi. « Le franchiseur devra également, afin d’assurer la pérennité de son réseau, faire de la recherche et du développement et renouveler son concept continuellement afin de maintenir sa capacité d’affronter la concurrence. » [15] Le franchisage est souvent associé aux établissements de restauration rapide ou les cafés, mais ce n’est pas uniquement son utilité. En effet, il se trouve dans beaucoup de secteurs.
[1]SAGAN, A., « D’actuels et d’ex-franchisés poursuivent Second Cup », Le Devoir, 27 novembre 2018, [en ligne] https://www.ledevoir.com/economie/542270/d-actuels-et-ex-franchises-de-second-cup-poursuivent-la-chaine-de-cafes.
[2] Id.
[3] REID, H., Dictionnaire de droit québécois et canadien, 5e édition, Montréal, Wilson & Lafleur, 2016, « franchise ».
[4] Voir le site de la Fédération française du franchisage [en ligne] www.franchise-fff.com
[5] Dunkin’ Brands Canada Ltd. c. Bertico inc., 2015 QCCA 624.
[6] Id.
[7] Morales c. Ménage-Poly inc., 2017 QCCQ 10123.
[8] Code civil du Québec, RLRQ, c. CCQ-1991, art. 1377. ; Provigo Distribution inc. c. Supermarché ARG inc.,1997 CanLII 10209 (QC CA).
[9] MATHIEU, P.-A., « Les conditions implicites du contrat de franchise : au-delà du réel ou de la lettre du contrat », dans Service de service la formation continue, Barreau du Québec, vol. 357, Développements récents en droit de la propriété intellectuelle (2012), Cowansville, Éditions Yvon Blais, p. 55-82.
[10]ALEPIN F. et L. BOITEAU, « Alternatives au franchisage et stratégies d’affaires », dans Service de service la formation continue, Barreau du Québec, vol. 285, Développements récents en droit de la franchise et des groupements (2008), Cowansville, Éditions Yvon Blais, p. 79.
[11] Id., p. 78-80.
[12] Rogers Cantel inc. c. Elbanna Sales inc., 2003 CanLII 43394 (QC C.A.).
[13] MATHIEU, P.-A., « Les conditions implicites du contrat de franchise : au-delà du réel ou de la lettre du contrat », préc., note 8.
[14] BOUCHARD, C., Droit et pratique de l’entreprise, 2e éd, 2e tome, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2014.
[15]ALEPIN F. et L. BOITEAU, « Alternatives au franchisage et stratégies d’affaires », préc., note 10..